jeudi 2 mars 2017

016 - L'apothéose

Il est un peu plus de 10h30. Nous avons franchi les portes du mythique « Kruger Park », depuis une heure trente. Nous venons de stopper notre véhicule, et arrêter le moteur. Personne ne parle, juste quelques chuchotements. L'instant est tout simplement magnifique. Là, à cinq mètres de nous se tient le lion, le roi des animaux. Il nous est apparu entre deux arbres, pour se coucher dans de hautes herbes, à l'ombre d'un bosquet. Il respire lourdement, semblant repus, et à la recherche d'un long moment de repos. Il fait chaud et sec. Nos gorges sont également seiches. Nous avons une chance inouïe. Les petits clics de nos appareils photos déchirent le silence, et attirent le regard du félin. Sa crinière brune encadre deux petits yeux jaunes qui croisent nos regards. Dans un grand bâillement, le lion laisse entrevoir ses larges crocs, comme pour bien nous rappeler qui il est. Derrière son air de peluche, cet animal sauvage peut développer des attaques foudroyantes. Pourtant, « notre » lion demeure alanguit, tête haute, flairant l'air, le souffle calme. Le temps est suspendu. A chacun de ses mouvements, notre taux d'adrénaline monte, puis retombe alors qu'il baisse la tête. De longues minutes passent sans que rien ne survienne. Puis, sans aucune raison apparente, le lion se dresse. Très calmement, dégageant une respectueuse sérénité, il traverse la piste à un mètre derrière notre véhicule, et se couche à nouveau sous un branchage, certainement plus adapté à son repos de l'après-midi. Nous le laissons là. Quelques mètres plus loin, nous reprenons nos discussion, laissant retomber l'excitation provoquée par cette majestueuse et royale rencontre.






Avant cela, nous avions quitté notre très confortable lodge vers 7h30 du matin. Sur les conseils avisés de Rainer, notre hôte du jour, nous avions choisi de détourner notre route, pour pénétrer le « Kruger Park », par la « Phabeni Gate », et prendre le temps de descendre par la route passant au cœur du parc, pour rejoindre « Bongani Game Lodge », où nous attendait un safari de fin de journée.

Une fois les consignes de sécurité à respecter à l'intérieur du parc  assimilées, nous avançons sur la piste, limités à une vitesse de 40 kilomètres heure. La température est de 27 degrés, et il n'est pourtant que 9h00 du matin. Nous progressons doucement, scrutant l'horizon, la moindre touffe, le moindre arbre. Au bout d'une petite dizaine de minutes, juste au bord de la piste, presque trop près, nous voici confrontés à une famille d'éléphants, sortant d'une mare, et affairée à arracher herbes et arbustes pour le petit déjeuner. Deux gros mâles encadrent femelles et petits éléphanteaux, faisant fête de cette copieuse nourriture. Un des mâles fait quelques mètres vers nous, menaçant, et à presque nous toucher, secoue soudainement sa tête dans un barrissement sourd, paraissant nous lancer un avertissement. Nous comprenons parfaitement ce message venu du ciel, l'éléphant faisant près de trois mètres de haut, défenses en avant, et ses grandes oreilles largement décollées. Il se recule un peu, comme persuadé d'avoir été clairement entendu, et reprend son repas, là où il l'avait laissé. Nous n'osons aucun mouvement, et attendons que les ripailles éléphantesques se terminent. Au bout d'un moment, laissant derrière eux, herbe piétiné, branchages effeuillés et arbres abattus, toute la troupe traverse la piste, et disparaît dans de hauts fourrés. 



Nous reprenons alors notre route. La traversée du parc, nous prendra plus de cinq heures, avant d'atteindre la « Malelane gate », sortie sud. Nous y retrouvons la nationale 4, qui nous permettra de rejoindre la petite route accédant à notre étape du soir. En fait de route, il s'agit d'une piste défoncée, où se succèdent profondes ornières, trous et bosses sur plus de sept kilomètres. Au bout d'une grosse demi-heure, nous parvenons, soulagés, à une sorte de camp de base, où nous devons abandonner notre voiture, et transvaser nos bagages, dans un énorme 4X4. Paul, notre chauffeur-guide, nous invite à grimper dans ce curieux véhicule, dont l'aspect baroudeur, laisse présager d'un nouveau trajet chaotique. Et, en effet, à peine franchi les premiers mètres de la nouvelle piste, nous voilà secoués de haut en bas et de droite à gauche, aux bons vouloirs des obstacles. Nous nous élevons rapidement en altitude. De somptueux paysages s'offrent à nos regards, mêlant savane et falaises, herbes hautes et arbres touffus. Aux détours d'un virage serré, en équilibre sur une imposante falaise, tel un phare dans la nuit, apparaît le «  Bongani game lodge ». Bien heureux d'être parvenus à bon port, nous prenons contact avec l'endroit qui s'avère être superbe, agrémenté d'une vue imprenable sur la vallée et la nature environnante. Le doux confort de nos chambres nous permet de nous remettre de nos émotions. Le responsable de l'accueil nous a très vite mis dans le bain, en nous avertissant que tout déplacement dans le lodge la nuit est interdit, sans l'accompagnement d'un membre de la sécurité. Il est vrai que nous sommes en pleine nature, isolés et entourés d'animaux sauvages.





A peine le temps de prendre une douche réparatrice, un petit thé, que nous retrouvons nos gros véhicules pour un safari de fin de journée. Le 4x4 s'enfonce dans les broussailles, dérangeant des Impalas, Nyalas, Koudous et autres Rhebuck (tous de la famille des antilopes). Sur le capot avant du véhicule, telle la vigie d'un bateau, un guide est assis sur un petit siège, soutenu par une solide ceinture. De là, il scrute la nature, et averti le chauffeur des éventuels pièges de la piste.




La radio crépite, et l'on entend les autres guide donner des instructions, et tenir tout le monde au courant de leurs découvertes. Quand, tout à coup à notre gauche, deux grosses masses sombres détalent. Ce sont deux rhinocéros. Malheureusement, ils sont derrière des arbres, et nous ne pouvons pas accéder à l'endroit où il se tiennent. Du moins, c'est ce que nous pensions car, pour notre chauffeur, ce n'est pas un problème. Un coup de volant à gauche, et nous pénétrons ce que nous pensions une muraille infranchissable. Un arbre se met en travers de notre route. Paul, tombe une vitesse, et fonce doucement dans l'arbre, qui se brise au devant de la voiture, et nous passons, poursuivant les deux mastodontes qui ont accéléré leur course. La course-poursuite à travers les broussailles dure quelques minutes, avant que le deux rhinocéros ne se retrouvent sur la piste. Là, ils adoptent un rythme plus tranquille, et nous les suivons calmement. Ils sont maintenant à un mètre de la voiture. Pendant que le premier se nourrit d'herbe, le second se retourne vers nous, menaçant. Nous craignons une charge. Notre guide, nous montre son pouce en guise de OK, et effectivement, le second rhino recule, et rejoint son compère.



Une voix excitée fait crépiter la radio. Les éléphants ont été vus dans le bas de la vallée. Notre chauffeur pousse le moteur, et nous survolons les méandres de la piste. Guidé par les voix de la radio, il prend à gauche, puis à droite, à nouveau à droite, comme guidé par d'invisibles panneaux de signalisation. Enfin, nous arrivons à l'endroit indiqué par les autres guides, mais juste à temps pour apercevoir cinq éléphants pénétrer les arbres. Là, impossible de les suivre. « May be tomorrow », nous dit Paul.

Après avoir stoppé sur un promontoire, surplombant la vallée, et dégusté un petit verre de vin blanc de Steleinboch, nous rejoignons notre lodge, quelque peu fatigués de la journée et de toutes nos émotions. Mais quelle fascinante journée !!! Le repas de soir sera pris dans l'enclos extérieur, autour d'un grand feu de bois, sous une constellation d'étoiles. 


Pourtant, il nous faudra nous coucher tôt, car demain matin, nous avons rendez-vous à 5h00, pour le dernier safari, moment où les animaux partent en chasse de nourriture.

Texte : HL
Photos : HLN et FL


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