jeudi 22 janvier 2015

8 - Jaisalmer, citadelle dorée du désert du Thar

Au bout de notre longue route, une belle surprise nous attendait : le «Rang Mahal Jaisalmer. Un magnifique hôtel copié sur les hôtels «héritage», avec tout le confort d'un palace. Piscine extérieure, spa, vertes pelouses avec salons d'extérieurs, salle de sport, chambres spacieuses bénéficiant de tous les services, dont un assez surprenant : la télé dans la salle de bain ! Nous profitons aussitôt pleinement de notre chance, et des derniers rayons du soleil. Au loin, la citadelle, gagnée par la pénombre, semble nous chuchoter le rendez-vous pour le lendemain.

Avant de nous rendre au cœur de la citadelle, nous faisons un détour par le lac de Gadhisar. Ce lac, comme tous les lacs indiens est sacré, car œuvre de dieu. En réalité, il a été créé par un des Maharadjahs de la ville, pour permettre à ses habitants de posséder une réserve d'eau. Un de ses successeurs installera plus tard le système de canalisation amenant l'eau de l'Himalaya dans toutes les maisons, mettant fin par là-même, aux joyeux manèges de vient et venue des femmes  transportant l'eau dans de grandes cruches juchées sur leur tête. Cette tradition reste de mise lors des fêtes annuelles. Le petit lac est bordé de larges volées d'escalier qui pénètrent dans l'eau. Ces larges marches sont appelées «ghats», les plus connus étant les ghats de Bénares, qui plongent dans le Gange. Au centre du lac, un petit temple où aimaient venir les Maharadjahs, avec leurs femmes de compagnie, pour écouter de la musique, se détendre et profiter de la fraîcheur du lieu. Les indiens viennent au bord du lac pour nourrir les poissons chats en leur jetant des pois chiches. Aussitôt, la surface de l'eau se met à bouillonner, et les poissons entremêlés se disputent les petites billes jaunes. Un vieux, très vieux joueur de cithare accompagne ce début de journée sous un chaud soleil qui se reflète dans les eaux calmes de la petite étendue d'eau.
Il est temps, désormais, de nous rendre jusqu'à la citadelle de Jaisalmer.

La grande porte nous permet de pénétrer ses murs épais, derrière lesquels, déjà, s'active une population estimée entre deux mille et trois mille personnes. Depuis trois ans, le site est classé au patrimoine de l'Unesco. L'accès aux voitures y est interdit, mais d'innombrables deux roues pétaradent et klaxonnent sans retenue. Sous les remparts, une petite fille qui vient de nous apercevoir, grimpe rapidement sur une corde tendue entre deux hauts piquets de bois, et entame son spectacle d'équilibriste. Elle doit à peine avoir dix ans. Elle évolue dans les airs avec un telle aisance et une telle grâce que nous restons là, comme hypnotisés. Une femme plus âgée, que nous supposons être sa mère, lui fait passer divers instruments destinés à rendre l'équilibre plus difficile. La petite fille semble ne pas s'apercevoir de ce qu'elle réalise, cela se déroule sans le moindre accroc, la moindre hésitation, tout naturellement. Le spectacle dure au plus trois minutes. A la dernière acrobatie, la fillette descend de son fil, aussi prestement qu'elle y était montée et nous salue les mains jointes, attendant une juste récompense, que nous lui donnons avec plaisir. Comment faire autrement devant ce petit sourire ?
Nous grimpons dans la citadelle, par la première chicane qui, autrefois, servait à ralentir d'éventuels envahisseurs. La grande cour d'entrée sert de parking au nombreux tuk-tuks qui déversent au plus près des marchands de souvenirs, un flot des touristes pressés. Notre marche dans les étroites ruelles est très souvent ralentie par les commerçants nous vantant la qualité de leurs marchandises. Celui-la nous promet le plus beau tissu du Rajasthan, celui-ci, les meilleurs prix, un autre détient des trésors rares, et le suivant les statues les mieux travaillées. Tout cela se fait dans une ambiance détendue, sourire aux lèvres, comme s'il s'agissait d'un jeu. La visite du palais se fait en compagnie de nombreux indiens, jouant les touristes de leur propre pays. Nous gravissons d'étroits escaliers aux marches bien trop hautes, traversons mille petites cours intérieures, atteignons une multitude de terrasses qui offrent une vue imprenable sur la nouvelle ville, avant de redescendre, et nous faufiler dans de sombres couloirs, pour déboucher à nouveau dans les ruelles encombrées. Débarrassés de nos chaussures, nous entrons dans un temple Jaïn. Une religion parmi tant d'autre dans cette Inde aux mille visages. Le petit temple est un trésor de sculptures. Ses colonnes de pierre, font surgir les personnages de la mythologie hindoue, hérissés des détails les plus finement dessinés. Les fidèles y sonnent la cloche avec de se prosterner et de toucher la pierre au sol de l'entrée.
Nous retrouvons l'atmosphère des petites rues, pour gagner le quartier des haveli. Tout comme celles de Mandawa, ces belles demeures sont pour la plupart inoccupées, mais y sont dans un bien meilleur état de conservation. Leurs façades, faites de petits balcons successifs, fermés ou ouverts sur la rue, témoignent de la richesse de leur propriétaire de l'époque. Certaines, cependant, sont encore occupées. La vente, en leurs murs, de petits objets artisanaux participe à l'entretien de ces grandes maisons.

Nous quittons la citadelle en fin d’après-midi, pour nous rendre à cinquante kilomètre de là, à proximité de la frontière Pakistanaise, nous perdre dans les dunes du désert du Thar, pour admirer le coucher du soleil. C'est à dos de dromadaire que se fera notre petit parcours. Ces animaux nous sont totalement inconnus, pourtant, après un peu d'appréhension, nous nous engageons sur la piste, menés par les chameliers, dont le plus jeune doit avoir douze ans. Les dromadaires sont parfaitement habitués à gérer les hésitations des groupes de touristes, et leur docilité nous rassure très vite. Au bout d'une vingtaine de minutes, nous apercevons les premières dunes de sable. Nous mettons pied à terre pour profiter de l'instant, et admirer le soleil s'enliser, tout doucement, jusqu'à disparaître en silence.

Plus tard, nous reprenons la route vers Jaisalmer.
A mi-chemin, notre véhicule stoppe son élan. Notre guide a gentiment prévu un apéritif au désert. Un peu de rhum indien, sous les premières étoiles. Nous levons nos verres à cette belle journée qui s'achève, avant de redémarrer.

Notre repas du soir se fera autour d'un thali rajasthani pris au premier étage d'un restaurant d'où nous pourrons admirer un feu d'artifice improvisé devant les remparts de la citadelle. Le thali est une spécialité indienne, préparé différemment selon les régions. Dans un très grand plateau, les traditionnelles galettes «nan», sont entourées de petites soucoupes contenant fromage aux épinards, boulettes de pois chiches, mouton à la tomate, riz, légumes en petits dès. Un éventail de saveurs et d'épices que viendra atténuer la chaleur d'une tasse de tchaï indien ou de thé noir.
Ainsi s'achève cette belle journée dans la citadelle du désert.
Texte Henry Lavesque - Photos Hélène Gros, Fabienne Lavesque





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