jeudi 29 janvier 2015

13 - Udaipur, la ville blanche




Udaipur se mire dans les eaux calmes des différents lacs qui l'entourent. Des fenêtres de notre hôtel, nous dominons l'un d'entre eux, sur les bords duquel les femmes viennent faire leur toilette ou laver le linge. Ces gâths, escaliers de pierre se perdant dans les eaux du lac, existent partout en Inde, pour peu que la ville soit construite près d'un fleuve ou d'une retenue d'eau.
Ce matin, le soleil se reflète dans l'eau, et nous entamons une promenade dans la vieille ville, qui doit nous amener jusqu'à notre bateau. A peine le premier pont franchit, nous plongeons dans l'effervescence des premières heures commerçantes. Nous réussissons à éviter les motos, les vaches et les tuk-tuks, pour arriver au pied d'une longue et abrupte montée d'escaliers qui donne accès au temple Jagdish, bâti au cœur de la cité, et datant du 16ème siècle. Ce temple, dédié au dieu Vishnu, est le plus grand de la ville. Ce matin, comme à accoutumée, une prière collective a lieu. Les fidèles sont assis à même le sol, font des offrandes à Vishnu et chantent des prières au rythme joyeux et soutenu. Dans le cœur du temple, photographies et films sont interdits, ce qui n'empêche par les nombreux touristes de sortir tablettes, appareils photos et caméras, de marcher sur les tapis, et bousculer les fidèles venus prier. Le sifflet et le bâton menaçant du gardien en uniforme n'y feront rien. Le déferlement des flash reprendra dès qu'il aura le dos tourné. Les façades de l'édifice pyramidal sont richement décorées de multiples statuettes aux diverses dimensions. Au bas des escaliers donnant sur la rue, des femmes accroupies tressent de longs colliers de fleurs que les fidèles déposeront devant l'hôtel du temple, après s'être inclinés devant la statue de Vishnu. La musique des prières s'estompe au fur et à mesure que nous avançons dans notre promenade à travers les ruelles de cette ville qui possède un vrai charme provincial. Les gens y sont avenants, souriants, et si certains nous abordent pour nous promettre monts et merveilles, ils restent toujours parfaitement courtois.
Quelques minutes plus tard, nous arrivons à l'embarcadère. Le bateau glisse sur les eaux tranquilles d'un lac parsemé des petits îlots où sont désormais installés des hôtels de luxe. Avant de passer sous les murailles imposantes du City palace, nous contournons le Lake palace, où furent tourner quelques scènes du film «Octopussy», de la série des James Bond. Sous un soleil sans voile, l'atmosphère est vraiment magique. Les palais succèdent aux palaces, et tous reflètent leur blanche façade, dans le miroir uniforme du lac Pichola. Cette petite balade en bateau qui nous mènera jusqu'aux portes de la vieille ville et de ses ghâts, nous offre une vision différente de la cité d'Udaipur.
Nous revenons sur la terre ferme pour poursuivre notre balade à travers la ville. Nous nous mettons à l'abri de la circulation démentielle, dans le magnifique «jardin des demoiselles d'honneur». Ici, les couleurs des saris des femmes indiennes se mélangent avec celles de bougainvilliers, glissant des hauts murs d'enceinte. Un grand bassin attend patiemment que les grands nénuphars qui le couvrent, ouvrent leurs fleurs pour participer de concert, à ce feux d'artifices de couleurs. Les arbres du voyageur, disséminés aux quatre coins du jardin, dressent leurs immenses feuilles en un éventail venant déposer une ombre légère sur l'herbe fraîchement coupée. Et, au beau milieu de ce jardin qui semble suspendre le temps, des familles indiennes, des couples encore intimidés, des petits vieux essoufflés, viennent se perdre quelques instants et profiter de ce petit paradis.
Pourtant, à quelques mètres à peine, la cohorte de moteurs est bien là, et toujours en mouvement.
Nous finirons notre visite d'Udaipur par un excellent petit repas, pris dans une étroite pièce, située tout en haut de l'étroit escalier d'une étroite maison, bordant une ruelle sombre et toute aussi étroite. Nous y dégustons un délicieux chicken curry servi par tout une famille qui se presse autour de nous, pour nous servir en montant et dévalant les escaliers quatre à quatre. Comme semble-t-il beaucoup de familles à Udaipur, ils proposent des repas, sont artistes en peintures miniatures, donnent des cours de cuisine avec stages soutenus, et offrent même des massages.
Pour ce soir, nous nous contenterons de leur bonne cuisine.

A trente kilomètres de Deogarh, se terminent les travaux de l'autoroute. C'est vraiment une bonne chose, car depuis notre départ d'Udaipur, le paysage s'apparente à un chaos. Ici, on perce la montagne pour un tunnel. Là, on double la voie existante. Là-bas, on arrache des arbres. A droite, on goudronne. A gauche, on creuse. Le tout, dans une poussière qui recouvre tout et rend l'air irrespirable. D'autant plus, qu'à tout ce bruit, à ces va et vient de gros engins, se mêle  l'exploitation des carrières de marbre qui fait la richesse de la région. 
Pourtant, avant de quitter Udaipur, nous avions visité le City Palace, résidence du maharadjah, qui domine le lac Pichola. Un lieu féerique tout droit sorti d'un conte des mille et une nuits. La grande cour d'honneur, dominée par le palais, donne aux visiteurs les dimensions de ce qu'il va découvrir. Il serait impossible de dire le nombre de pièces traversées et de cours intérieures arpentées. Difficile également de décrire comme il se doit la richesse des décors, des boiseries colorées, des fresques en stuc, des peintures murales, des portes de bois ciselées, des tissus. Tout ici exprime le goût pour la beauté et la démesure. Il faudrait prendre le temps d'imaginer ce lieu à l'époque des fastes de la cour des maharadjahs avant l'indépendance de l'Inde. Les chevaux dans la cour bardés de turbans colorés, impatients de partir à la chasse, les combats titanesques des éléphants, les grandes soirées et réceptions du maharadjah et sa maharani, et tout cela dans ce décor majestueux. Il faudrait prendre le temps, certainement. Pourtant, déjà, nous devons nous mettre en route pour Deogarh, que nous atteindrons après trois heures d'une route déprimante... et nous n'aurons fait que 130 kilomètres !
Texte Henry Lavesque, Photos Hélène Gros, Fabienne Lavesque

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire